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Des Blabla
13 juin 2017

Ecoutez nos défaites

Ecoutez-nos-defaites

J'aime les livres de Laurent Gaudé. Mon préféré définitivement reste " Sous le soleil des Scorta ", suivi de près par " Pour seul cortège " mais je pense que la troisième place va être tenue par " Ecoutez nos défaites ".

C'est annoncé comme un roman, j'aurais plutôt dit qu'il s'agit d'un essai, un essai philosophique romancé car tous les personnages évoqués n'ont pas existé mais, pour le reste, il y a beaucoup d'enseignements à tirer de ce livre ou, plutôt, il n'y en a qu'un, unique, universel qui est dit page 247 : " Les hommes finissent toujours vaincus " et c'est cela que nous raconte Laurent Gaudé.
On peut être un général victorieux de la guerre de Sécession, on peut être un dictateur vaincu, on peut être un soldat vainqueur d'un des plus grands chefs terroristes, on peut être un archéologue cultivé assassiné, on peut être un héros de l'Antiquité vainqueur puis défait par Rome, on finit toujours par être vaincu d'une façon ou d'une autre...
Et si l'on s'en tient là, ce livre est d'un pessimisme absolu mais Laurent Gaudé nous raconte également que ce sont aussi les défaites qui nous construisent, qui font les légendes et l'Histoire ou notre histoire.

Au travers de tranches de vie choisies dans l'existence du Général Grant, vainqueur des Sudistes et futur président des Etats-Unis, de Hailé Selassié, roi des rois d'Ethiopie chassé par les Italiens puis dictateur déchu, d'Hannibal, général carthaginois qui mit en échec les romains sur leur territoire avant que l'Empire n'aille le battre jusque dans sa ville et de Sullivan Sicoh, qui est un soldat de fiction envoyé pour tuer Ben Laden et combattre en Afghanistan. On croise également Khaled al-Assaad, le conservateur de la cité antique de Palmyre assassiné par l'Etat Islamique.
Il y a comme une fatalité à la vie, on ne peut pas gagner. Qu'on soit du côté des " gentils " ou de celui des " méchants ", on finit toujours par perdre le combat, la mémoire collective se chargera juste d'en conserver la couleur du souvenir...
Mais le méchant est-il bien le méchant ? Tout n'est-il pas question de nuances de gris à côté de l'idée quelque peu manichéenne qu'on se fait des figures historiques ?

Laurent Gaudé, avec son style si fluide, nous raconte tout cela sans que l'on perçoive toute cette profondeur de prime abord. On le laisse nous embarquer dans ses petits récits entrecoupés, liés. On cherche plus ou moins le lien entre tous ces hommes, le fil ténu qui tient les pages ensemble mais à la moité du livre, on s'aperçoit de la supercherie : l'enjeu là où on l'attend.
Alors, j'ai commencé à comprendre que je faisais erreur en attendant un récit classique ou, au contraire, volontairement complètement déconstruit. J'ai commencé à comprendre que ce qu'il me racontait était ailleurs, différent, plus subtil, plus profond et, là, j'ai plongé avec encore plus de plaisir dans cette lecture douce et amère jusqu'à la dernière ligne...
Non, peut-être pas jusqu'à la dernière ligne car j'avoue que les quelques toutes dernières pages m'ont semblé un peu " faciles " ou, du moins, je dirais moins en accord avec tout le reste mais ce n'est que mon avis.

Encore une fois, je me suis laissée émerveiller par la plume de Laurent Gaudé et ça fait un bien fou...

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Commentaires
L
J'ai adoré "Le Soleil des Scorta", c'est un des plus beaux livres que j'aie jamais lus. Je ne connaissais pas "Pour seul Cortège", je sens que je vais essayer de le lire bientôt! Merci pourl e "hint"! :-)
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Des Blabla
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