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Des Blabla
28 avril 2015

Travail

Ce week-end, il y avait un reportage à la télévision à propos du harcèlement dans les cuisines des restaurants et s'en suivait une interview de Thierry Marx.
Il était question des brimades physiques et psychologiques.

A un moment, il disait que si ça se passait mal au moment du coup de feu, c'est que le chef n'avait pas bien travaillé en amont car s'il ne peut tout faire lui-même il faut qu'il délègue mais en contrôlant car s'il n'y a pas de contrôle alors les choses se délitent.
Dans ma branche, j'en suis au deuxième patron qui ne veut pas avoir à mettre le nez dans les dossiers ou les relire avant de les faire signer (et qui le dit à voix haute et qui vous reproche vertement si vous le contraignez à le faire !). Tout doit être cadré par les employés sans même qu'ils n'aient à relire...
La différence, c'est que le premier ne nous tombait pas dessus violemment si on faisait une erreur, vu que lui-même ne l'avait pas vue, voire n'était pas capable de la voir.
Mais, là, en plus, avec lui, il ne supporte pas qu'il y ait la moindre erreur...
Si j'avais les connaissances d'un patron, je serais patron ou, du moins, j'en aurais suivi la formation.
Mais ce n'est pas le cas !
J'ai même étais déclassée pour une question de salaire et donc ma fiche de poste est encore moins autonome qu'elle ne l'était auparavant...
Et, pourtant, je me fais traiter d'incapable à longueur de temps. Devant les clients, devant les collègues...
"Un chef qui gueule, c'est un chef qui a délégué sans contrôler, qui a abandonné son pouvoir et qui s'en aperçoit au mauvais moment."

Thierry Marx disait que les mots finissent par se transformer en maux et qu'à force de dire à quelqu'un qu'il est mauvais il le croit.
Aujourd'hui, je le crois...
Et vous pouvez tous m'engueuler en me disant que mon patron est un fou, un pervers et que, par conséquent, JE DOIS prendre du recul, JE NE PEUX PAS accorder foi à ce qu'il peut me dire.
Aujourd'hui, c'est un fait : 10 heures par jour (ah oui, parce que lui ne fait pas de pause déjeuner, il préfère fouiller dans nos bureaux et nous bouffer nos affaires), j'entends que je suis nulle, que je ne sais pas travailler et que, de toutes façons, je ne travaille pas. Dès qu'il m'adresse la parole, c'est pour un reproche alors, oui, aujourd'hui, je me mets à le croire, à vérifier quinze fois tout ce que je fais de peur de faire une malheureuse erreur.
Oui, je sais : cela fait presque dix ans que je n'ai pas traité certains types de dossier et deux ans pour d'autres. Oui, il paraît que c'est normal d'avoir un temps de réadaptation et que je ne suis pas à remettre en cause.
Sauf qu'à longueur de journée, je butte sur ce que je ne sais plus !
Et qu'à longueur de journée il met le doigt dessus et il appuie bien fort...
Ajoutez à cela que je récupère des dossiers qui ont été abandonnés sans suivi pendant plus d'un mois et que, pour certains, c'étaient déjà des dossiers qui traînaient depuis plusieurs mois (la personne avant moi ne gérait les choses qu'au dernier moment !).
Du coup, c'est vrai que je pourrais me dire que c'est plutôt une chance que j'arrive, dans ces conditions là à voir des problèmes et, parfois, à les régler avant de signer mais, non, car à chaque fois, c'est l'occasion d'une rebuffade, d'une petite réflexion bien sentie et, notamment, sur le fait que mes collègues, elles, elles arrivent bien à s'en sortir et que lui, il en a marre d'être hyper patient avec moi, que personne ne l'aurait été autant à sa place...

La preuve, samedi, à propos d'un document dont j'ai fait la demande le jour même où on me l'a confié et qui n'est toujours pas revenu du service administratif. Et bien, ce n'est pas possible. Ca ne prend jamais ce temps là ! De toutes façons, dès que tu touches un dossier il y a une merde, c'est bien que tu ne sais pas faire !
Oui, oui, je sais, à ce moment là, j'aurais dû lui répondre ! Oui, oui, je dois me rebeller et lui coller le nez dans la merde...
Sauf que, une réflexion par ci, par là, vous pouvez réagir. Moi, non stop, toute la journée, je n'y arrive plus et quand, par hasard, j'essaye de me justifier (comme, samedi, en arguant, à juste titre, que la demande a été faite dans les temps et que je ne suis pas responsable des délais de l'administration), il tourne casaque, change de sujet ou attaque sur un autre angle du type : " je ne veux pas savoir ! " ou " et ça alors ? Tu l'as fait ça ? "

Alors, oui, à force de voir les justifications de ses arguments sous mes yeux dans mes dossiers, je finis par croire que c'est moi qui ne suis plus dans la normalité et j'en rêve la nuit... quand j'arrive à dormir...
Du coup, entre pression de plus en plus forte et fatigue, je perds pieds...
Et comme il tente de diviser les salariés en leur disant que c'est à cause de moi qu'elles subissent un surcroît de travail, les distances s'accroissent aussi et je me sens seule...

Et ne me dites pas non plus que le stress du travail est partout !
Je le sais, je le connais. Sortir les dossiers à temps, faire avec des gens qui veulent tout tout de suite.
Ca, c'est très différent que d'être face à quelqu'un qui vous démonte.
Quand j'étais chez le premier patron dont je vous parlais plus haut (celui qui ne voulait pas regarder les dossiers avant !), je faisais des heures pas possibles, j'avais des coups de stress sur des problèmes à régler au dernier moment mais je sortais des dossiers en veux-tu en voilà !
J'ai bossé pour deux autres patrons qui, eux, cadraient les dossiers avant, les suivaient de loin en loin jusqu'au bout, avec qui vous pouviez évoquer les problèmes ou difficultés rencontrées mais, là, je vous parle d'une génération qui a pris sa retraite...
Est-ce la mentalité de cette jeune génération ?

Mais je vous promets que j'essaye de me fermer dans ma bulle pour que cela m'atteigne le moins possible et j'y arrive plutôt bien quand il attaque sur des points de rentabilité pure mais pas quand c'est sur moi...
Et puis, je crois aussi qu'il s'est aperçu qu'il me touchait moins sur certains points et, du coup, je me demande s'il ne change pas aussi son fusil d'épaule comme par exemple, un jour où il me faisait un sermon et où je gardais les yeux rivés sur mon écran d'ordinateur et où il m'a traitée comme une petite fille en me demandant de le regarder quand il me parlait, qu'il se demandait vraiment où j'avais été élevée et en ne me lâchant pas jusqu'à ce que je lève les yeux vers lui mais, du coup, pour le faire, j'ai dû sortir de ma bulle, je n'étais plus en position de lui résister...

Il faut que je me détache de tout cela. Je devrais m'en moquer et me dire que c'est temporaire, me ficher de ce que les clients pourront dire et lui aussi mais je ne sais pas ne pas essayer de faire au mieux alors je reste tard le soir et entre midi et deux pour essayer de " rattraper " parce que ce n'est pas possible de ne pas y arriver. Vous savez, c'est comme dans les cauchemars quand vous essayer de courir pour échapper à quelque chose et que vos pieds sont plantés dans le sol et refusent de bouger. Vous avez beau savoir que c'est un cauchemar, que vous allez vous réveiller à un moment donné, vous ne pouvez pas vous empêcher de vous escrimer à essayer de courir et la panique s'emparer de vous et, bien là, moi, c'est pareil !
Alors, pour tenter quand même de lutter, je compte les jours jusqu'au dernier de mon contrat.
Je suis allée voir la permanence juridique pour m'assurer qu'à la fin du contrat je pourrai partir sans qu'il y ait de conséquence dommageable.
Je ris très très (trop ?) fort dès que je peux.
Je cherche le moindre petit rayon de soleil qui fait un joli reflet sur les jeunes feuilles des arbres pour m'extasier sur la poésie de la nature.
Je regarde mon compte en banque juste pour le réalimenter car les kilomètres qui s'engrangent vident mon compte encore plus sûrement que les impôts mais je refuse d'y réfléchir plus avant et de resserrer encore plus la ceinture.
Je dis à mes proches que je les aime très fort.
Je plante des fleurs dans mon jardin et rêve à une récolte monumentale de figues... un jour !

Je parle de mon vécu qui a trouvé une forte résonance dans le reportage et l'interview de ce qui se passe dans les grandes cuisines mais on peut élargir à plein de domaines et je pense que ce que je traverse est loin d'être le pire de ce qui existe aujourd'hui dans le monde du travail.
Il y a juste qu'aujourd'hui, j'ai envie d'en parler.
J'ai aussi envie de parler de ce monde du travail qui est en pleine déliquescence car, dans ma branche en tous cas, il n'y a aucune ouverture, il y a cinq ou six cv qui arrivent par semaine et pas ou très peu de places.
J'ai envie de parler de cette réforme de Pôle Emploi qui fait tout pour aggraver ce type de situations puisque, maintenant, un employé qui rompt sa période d'essai est considéré obligatoirement comme démissionnaire et perd ses droits aux allocations.
Alors, pourquoi les patrons feraient cas de leurs employés, il en ont des dizaines qui attendent et ceux qui sont en place ne peuvent pas bouger le petit doigt car ils perdraient tout et avec très peu d'espoir de retrouver un emploi ?
Et je ne vous parle pas de ce qui est, bien évidemment, interdit officiellement mais qui se pratique à tire larigot, le fait qu'un futur employeur se renseigne toujours auprès du précédent...

Mais à quel moment tout a commencé à dérailler ?
A quel moment, les gens se sont dit qu'il fallait absolument être sous pression pour bien travailler ?
A quel moment la force vive du travail est devenue une marchandise corvéable, manipulable, éjectable ?
Pourquoi dans d'autres pays cela se passe t'il différemment ? Comment y arrivent ils ?

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Commentaires
P
Je ne vais sûrement pas t'engueuler, je connais trop bien ce genre de situation. <br /> <br /> Et j'ajoute que tant qu'on ne l'a pas vécu soi-même, on NE SAIT PAS ce que c'est.<br /> <br /> Courage, tu sais ce que tu vaux, sois-en convaincue, lui n'est qu'un gros connard qui harcèle moralement ses employés.
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D
Pour moi, tu touches du doigt un truc plus large que le délitement du monde du travail. On parle de l'humain, et le fait de le rejeter ou de l'humilier est le propre des sociétés en péril... Bon courage. Bises
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Des Blabla
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